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Concours d’infractions : précisions de la Cour de cassation sur le quantum maximum de la peine

Pénal - Droit pénal général
11/02/2020
Concours d’infractions, récidive, peine étrangère, application de la loi dans le temps … La Cour de cassation vient préciser le quantum maximum de la peine à exécuter. 
Un homme a été condamné :
  • pour des faits d’importation non autorisée de stupéfiants en 1995 à dix ans d'emprisonnement ;
  • pour vol avec arme en bande organisée en récidive en 2008 à quinze ans de réclusion criminelle ;
  • pour des faits de vol avec violences et menace, avec effraction et fausses clés dans une maison habitée, enlèvement, détention et séquestration d’une personne pour préparer ou faciliter la commission d’un crime, détention et port d’arme prohibée commis en 1999, à dix-huit ans de réclusion criminelle en 2013 par le Luxembourg.
Le procureur de la République décide en 2015, sur le fondement de l’article 132-23-1 du Code pénal dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-242 du 10 mars 2010, de ramener à quinze ans la durée de la dernière peine prononcée. Il tient compte du maximum légal applicable, soit trente ans de réclusion et la peine de quinze ans de réclusion prononcée par la cour d’assises en 2008.
 
Le condamné a contesté cette décision devant la chambre de l’instruction. Saisie également d’une demande de confusion des deux peines, la juridiction s’est déclarée incompétente pour statuer sur la contestation de la décision du ministère public et a partiellement accueilli la demande de confusion. La décision de la cour d’appel a fait l’objet d’un pourvoi en cassation. La Haute juridiction a alors rejeté le pourvoi formé contre la décision d’incompétence mais a censuré l’arrêt concernant la confusion. La décision du procureur de la République n’ayant pas été régulièrement notifiée au condamné, elle n’a pas acquis de caractère définitif. Suite à cela, la décision du procureur de 2015 a été régulièrement notifiée au condamné en 2018. Il décide alors de la contester et dépose une requête devant la chambre des appels correctionnels.
 
La cour d’appel va fixer à vingt ans le maximum légal le plus élevé à exécuter, retenant que les faits sanctionnés par la cour d’assises ont été commis avant 2010, année de l’entrée en vigueur de la loi n° 2010-242. Dispositions non applicables.
 
Un pourvoi va être formé par la procureur général. La Cour de cassation va alors rappeler différentes dispositions du Code pénal :
  • l’article 112-2 prévoit que les lois relatives au régime d’exécution et d’application des peines sont applicables immédiatement pour des faits commis avant leur entrée en vigueur, quand elles ne rendent pas plus sévères les peines prononcées ;
  • l’article 132-2 dispose qu’il y a concours d’infractions lorsque l’une est commise par une personne avant qu’elle ait été définitivement condamnée pour une autre ;
  • l’article 132-4 précise qu’en cas de procédures séparées, lorsque la personne poursuivie est reconnue coupable de plusieurs infractions en concours, les peines prononcées doivent s’exécuter cumulativement dans la limite du maximum légal le plus élevé ;
  • l’article 132-5 prévoit que lorsque la réclusion criminelle à perpétuité est encourue pour une des infractions en concours et qu’elle n’a pas été prononcée, le maximum légal est fixé à trente ans de réclusion ;
  • l’article 132-8, lorsqu’une personne a déjà été condamnée pour un crime ou délit puni de dix ans d’emprisonnement, et commet un crime passible de vingt ou trente ans de réclusion, le maximum de la peine encourue est portée à la perpétuité ;
  • l’article 132-23-1, issu de la loi du 20 mars 2010, précise les condamnations d’un État membre de l’Union européenne sont prises en compte dans les mêmes conditions que celles prononcées en France et produisent les mêmes effets.
La cour d’appel a estimé que la loi du 10 mars 2010 n’était pas applicable à la date de l’arrêt de la cour d’assises de 2008. Ainsi, elle a fixé le maximum légal des peines à vingt ans.
 
Néanmoins, la Cour de cassation (Cass. crim., 8 janv. 2020, n° 19-80.349) censure l’arrêt. Pour elle :
  • la condamnation du 28 mai 2008 avait pour maximum encouru la réclusion criminelle à perpétuité ;
  • avant l’entrée en vigueur de la loi du 20 mars 2010, « les dispositions de l’article 132-4 du Code pénal ne pouvaient être appliquées, et les deux peines auraient dû être exécutées cumulativement, pour une durée totale de trente-trois ans » et « l’application de l’article 132-23-1 du Code pénal conduisant en l’espèce à la réduction de la durée des peines à exécuter, cette disposition constitue donc une disposition plus favorable pour le condamné et s’applique immédiatement à la présente affaire ».
Ainsi, la Haute juridiction estime que « par application de l’article 132-23-1 du Code pénal et de l’article 132-5 du même Code, le maximum légal encouru par M.X à l’occasion des deux peines prononcées à son encontre le 28 mai 2008 et le 19 février 2013 s’élève, en conséquence, à trente ans de réclusion criminelle ». La cassation est donc encourue.
Source : Actualités du droit